Gouvernement minoritaire: la fin des idéologies?

Fin de session parlementaire à Québec. Une session parlementaire fructueuse aux dires du Premier ministre Charest. En tout, 34 projets de loi ont été adoptés après être passé au crible par l’opposition en position de force par rapport au gouvernement libéral minoritaire. Un record d’après les analystes et Mr. Charest lui-même et le gouvernement n’a même pas utilisé le bâillon avant les fêtes! Outre l’analyse approfondie de la portée de chacun de ces projets de lois, j’ai trouvé étonnant qu’un gouvernement minoritaire se targue d’en avoir fait autant et même d’en être satisfait. Les analystes nous annonçait, il y a déjà de cela quelques mois, qu’un gouvernement minoritaire ne pouvait se maintenir et offrir un travail satisfaisant. Il faut absolument un parti majoritaire pour assurer la stabilité politique, d’après ces analystes. Mais, la preuve est maintenant faite, un gouvernement minoritaire peut fonctionner. Friand de contradiction et d’analyse cursive, Mr. Charest en a tout de même profité pour faire comprendre aux québécois qu’il lui faut un mandat majoritaire, car l’opposition l’a empêché d’abaisser de 0,08 à 0,05 ppm la limite d’alcool permise au volant. Odieux ! (sic)

Les bienfaits des gouvernements minoritaires

Très simplement, je dirais que le premier bienfait de ce type de gouvernement est qu’un parti ne peut gouverner seul. Il doit bien entendu s’entendre avec l’opposition, rectifier son tir et amender de nombreuses fois ses projets de lois. En gouvernement minoritaire, nous nous éloignons donc un peu de l’idéologie de parti qui prévaut normalement en situation majoritaire. Les débats d’idées peuvent commencer à se pointer le nez et un consensus peut se dessiner. Le poids des autres partis politiques devenant donc plus important. Encore faut-il être de bonne foi et assurer le bon fonctionnement des débats. Je pourrais aussi ajouter que ce type de gouvernement ravive un peu l’intérêt de la population pour la politique, car elle considère que son vote a un peu plus de poids que par le passé. C’est une amélioration minime, mais tout de même. Un regain d’intérêt ne peut être que bienvenu pour la démocratie à venir.

Les méfaits potentiels…

Car il n’y a pas que des bienfaits aux gouvernements minoritaires. L’une des dérives potentielle, qui d’ailleurs est déjà enclencher, est celle du populisme. C’est à celui ou celle qui sera le plus au diapason avec la « population » qui aura le crédit nécessaire pour espérer être amené au pouvoir de façon majoritaire. Les partis règneront par sondage d’opinion. La « sondocratie » faisant place à la démocratie. Les visions à court terme et l’appel aux passions du peuple deviendront incessants. Les partis d’opposition pourraient à n’importe quel moment menacer d’entrer en élection. Par exemple, l’ADQ a à deux reprises, de façon maladroite et idéologique, provoqué un mélodrame et menacé la chute du gouvernement. Leur manque de sérieux a dû être compensé par une discussion entre les libéraux et les péquistes. La stratégie de Dumont était claire et simple : en faire le moins possible en espérant que la position des deux autres partis soit impopulaire et les accuser d’être des « vieux partis ». On notera ici un profond manque de maturité politique. Agir ainsi et faire croire ensuite qu’on le fait pour la population québécoise est profondément aberrant et grotesque. Ce genre de dérive n’est pas anodin, Dumont l’utilise à l’extrême et de façon très maladroite, mais un politicien un peu plus intelligent pourra utiliser cette arme de façon plus subtile et toute autant improductive.

Que suggérer alors?

Une réforme du mode de scrutin s’impose. Pas simplement pour assurer un poids plus équitable entre les électeurs, mais pour assurer la venue d’autres partis politiques. Ce pas franchi assurerait un minimum de démocratie et donnerait un regain d’intérêt pour la chose politique auprès de la population. Une étape ultime serait bien entendu celle d’une décentralisation des pouvoirs vers les régions, les villes et les communautés. Mais cette décentralisation ne doit pas se faire de front. Les québécois doivent tout d’abord reprendre goût à l’exercice politique et comprendre les enjeux réels d’une société. Discuter et échanger avec les autres permet un remaniement de ses idées. Ainsi pourrions-nous espérer une société moins dominée par les idéologies?

Qu’en pensez-vous?

Joyeuses fêtes et bonnes discussions avec vos familles et amis!

Des doctrines et des hommes-Partie 3

Pourquoi un blogue voué entièrement à une lutte contre-doctrinaire? La question se pose et je crois qu’il serait bien avisé pour mes lecteurs que j’y réponde. Je dois dire que l’idée n’est pas soudaine et ne survient pas suite à des événements récents. L’idée mûrit depuis un certain temps et suit l’évolution de mes pensées et de mes lectures concernant la société, la politique, la démocratie… La démocratie est justement le point de départ de cette évolution. Je souffrais d’un inconfortable sentiment de déficit démocratique qui me rendait cynique, prêt au renoncement : « de toute façon, ils décideront à notre place et nous finirons par oublier ». J’en suis venu à comprendre que c’est justement ce genre de ressentiment que les décideurs désirent nous voir adopter. Il faut retenir qu’il devient plus facile pour les maîtres autoproclamés de commander lorsque la populace a déjà renoncé. Certes, ce constat est exagéré et concerne plus spécifiquement une situation dictatoriale. Lorsqu’un minimum de démocratie est présent et lorsqu’un minimum d’idées divergentes existe, une dynamique tout aussi pernicieuse que la dictature s’initie. Les décideurs font appel à deux méthodes : l’utilisation de thinktanks et le discours démagogique.

Les thinktanks sont ces groupes d’intellectuels formés dans un but précis : faire valoir leur idéologie et chercher à constituer l’agenda politique. Ils sont omniprésents dans de nombreux médias télévisés, écrits et radiophoniques. Ils constituent donc l’essentiel de la fabrication de l’opinion. Leur statut d’ONG leur donne une apparence d’objectivité, mais celui-ci masque une partialité sans borne. Ces «boîtes à pensées», il ne faut pas l’oublier, protègent et alimentent des intérêts financiers et/ou politiques.

Fort du terrain préparé par les médias et leur thinktank, les politiciens peuvent aisément marteler les mêmes doctrines, mais en usant de discours simplistes et en occultant les nuances. Pour emporter l’adhésion des masses, le démagogue utilise son charisme et s’adresse au peuple, présenté comme monolithique, en lui disant qu’il connaît ses préoccupations. Par exemple, son désir de changement (ça ne vous évoque pas quelque chose?) et ses frustrations étant perpétuels, celui qui incarnera le mieux ces deux pans gagnera l’adhésion de nombreuses personnes. L’idée est fort simple, il s’agit d’alimenter le ressentiment et de s’incarner réformateur, pas besoin de l’être réellement. Si nous poussons plus loin la réflexion nous nous apercevons que « l'argumentation démagogique est délibérément simple afin de pouvoir être comprise et reprise par le public auquel elle est adressée. Elle fait fréquemment appel à la facilité voire la paresse intellectuelle en proposant des analyses et des solutions qui semblent évidentes et immédiates ». Les promesses électorales non tenues sont ces solutions «évidentes et immédiates», se demander pourquoi elles n’ont pas été tenues c’est comprendre qu’elles n’étaient tout simplement pas des solutions.

Comment se prémunir contre les thinktanks et les démagogues.

1- Se demander qui parle et pour qui il parle.
2- Se méfier des solutions simples et évidentes, car il faut retenir qu’aucune solution n’est simple ni évidente lorsque ça concerne des milliers voire des millions de personnes.
3- Lire abondamment les informations de plusieurs médias populaires et journaux alternatifs.
4- Lire ce livre essentiel : « Petit cours d’autodéfense intellectuelle » de Normand Baillargeon. Je juge ce quatrième point plus important que les trois autres, car en plus de les inclure, Baillargeon propose en bout de ligne une trentaine de moyen servant à se défendre intellectuellement. Ce livre est un véritable bijou. J’y reviendrai dans une autre chronique.

Pourquoi ce blogue?

L’effort pourrait paraître futile voire inutile. Je ne prétends pas non plus pouvoir avoir un impact particulier et significatif sur la société, néanmoins je désire faire de ce blogue un espace libre pour les idées. J’espère pouvoir rallier ceux et celles qui comme moi considèrent que les doctrines prennent trop de place dans notre société. Mon but est aussi de pouvoir rassembler des personnes de toutes opinions à discuter de façon raisonnable, donc au mieux possible, évacué de tout dogme.

N.B : Vous ne verrez pas une abondance de chronique apparaître sur ce blogue comme vous pouvez en lire sur certains autres. Trois raisons expliquent cela : 1) Je suis perfectionniste et je prends mon temps pour écrire une chronique, 2) je suis extrêmement occupé par mes études doctorales et je dois souvent abandonner la blogosphère pour plusieurs jours voire des semaines entières et 3) j’ai une vie à l’extérieur du cyberespace.

Des doctrines et des hommes-Partie 2

Avant de commencer, je dois le dire et l’écrire, ce que j’écrirai ici dans cette chronique n’est pas nouveau et n’a pas la prétention d’être original. Des milliers d’articles, de thèses et de livres ont été écrit à ce sujet. Comme je l’ai mentionné dans ma chronique précédente, ce texte exposera les dangers des doctrines et des idéologies. Je débuterai avec cette affirmation : Les idéologies ont, dans l’Histoire, provoqué de nombreux méfaits et fait beaucoup de souffrances ; cela tout le monde le conçoit. Malgré ce truisme, le monde actuel n’est pas exempt d’idéologie.

Partie 2- Le danger des doctrines et idéologies

Une doctrine devient délétère dès lors que l’on affirme son caractère irrécusable ; un ensemble de doctrine irrécusable devient une idéologie. Comme Hannah Arendt l’affirme dans son essai sur le totalitarisme, l’idéologie se définie par « la logique d’une idée ». Elle souligne qu’à partir d’une prémisse de base, l’idéologie donne un sens à tout événement quel qu’il soit ; c’est le pouvoir de tout expliquer. Là débute le premier danger de l’idéologie, celui de s’auto-affirmer comme vraie, d’occulter la pensée critique et les arguments contraires et de s’exclure de toute forme d’expérience. En bref, l’idéologie se fait, de par sa logique fallacieuse, le compagnon du mensonge. Le second pas à franchir sera celui de la transmission de cette idéologie.

L’outil de prédilection pour la transmission de l’idéologie est l’endoctrinement. Il s’agit bien entendu de pouvoir gagner quelqu’un à sa cause par « des moyens de persuasion davantage liés aux affects qu’à la raison ». Divers moyens de pressions psychologiques sont utilisé comme celui de susciter l’espoir ou de provoquer la peur. Il s’agit aussi de marteler incessamment les mêmes affirmations et ici, l’ultra simplification est de mise pour que celle-ci soit reprise et répétée facilement par tout le monde. J’expose ici le second danger de l’idéologie qui est celui de la manipulation mentale via l’usage de la propagande. Il ne faut surtout pas sous-estimer l’efficacité de ce moyen de persuasion, il est redoutable. Le dernier pas à franchir sera celui de l’usage de la force.

Le propre d'une idéologie est de chercher à s'imposer, y compris par la violence, en refusant tout apport d'autres modes de pensée qui n'entrerait pas dans son cadre. Ce pas franchi illustre tout le mépris pour l’Homme que l’idéologie peut exprimer ; l’idéologie passant bien sûr avant les Hommes. C'est lorsque la boucle de l’endoctrinement et de la violence s'initie que l’idéologie fait ressortir avec le plus de netteté tous ses méfaits. Voici un extrait d’une pièce de Sartre, Les mains sales, qui illustre assez bien mon propos. Dans ce texte Hoederer traduit la violence idéologique qui donne froid dans le dos, tandis que Hugo représente l’idéaliste qui se bat pour une cause qui lui semble(ait) juste… jusqu’à ce que le dérapage ne survienne.

« Hugo : Il n'y a qu'un seul but: c'est de faire triompher nos idées, toutes nos idées et rien qu'elles.

Hoederer : C'est vrai : tu as des idées, toi. Ça te passera.

Hugo : Vous croyez que je suis le seul à en avoir ? Ce n'était pas pour des idées qu'ils sont morts, les copains qui se sont fait tuer par la police du Régent ? Vous croyez que nous ne les trahirons pas, si nous faisions servir le Parti à dédouaner leurs assassins ?

Hoederer : Je me fous des morts. Ils sont morts pour le Parti et le Parti peut décider ce qu'il veut. Je fais une politique de vivant, pour les vivants.

Hugo : Et vous croyez que les vivants accepteront vos combines ?

Hoederer : On les leur fera avaler tout doucement.

Hugo : En leur mentant ?

Hoederer : En leur mentant quelquefois. (...)

Hugo : Je n'ai jamais menti aux camarades. Je... À quoi ça sert de lutter pour la libération des hommes, si on les méprise assez pour leur bourrer le crâne ?

Hoederer : Je mentirai quand il faudra et je ne méprise personne. Le mensonge ce n'est pas moi qui l'ai inventé: il est né dans une société divisée en classes, et chacun de nous l'a hérité en naissant. Ce n'est pas en refusant de mentir que nous abolirons le mensonge: c'est en usant de tous les moyens pour supprimer les classes.

Hugo : Tous les moyens ne sont pas bons.

Hoederer : Tous les moyens sont bons quand ils sont efficaces».


Toutes les idéologies n’atteignent pas nécessairement ce niveau de dangerosité, mais force est d’admettre que la plupart ont osé le franchir (et le franchiront…). Ici, l’Histoire nous fourni de nombreux exemples d’idéologies ayant dérapées vers la barbarie. Je vous épargne par contre la longue énumération, car vous les connaissez déjà presque tous. Puis il faut aussi savoir que le monde actuel n’est pas exempt d’idéologie prônant la violence, mais cela encore vous le savez. Si le passé est garant de l’avenir, je crois que nous pouvons admettre avec raison que l’Histoire est en train de se répéter et qu’elle se répètera encore malheureusement…

Des doctrines et des hommes-Partie 1

Dans ce premier texte divisé en trois parties, j’expliquerai les raisons qui m’ont amené à créer un blogue voué exclusivement à une lutte contre-doctrinaire. D’emblée, je me dois d’affirmer que ce blogue se veut être une réaction à tout ce qui, sous le couvert du dogme, se dit dans les médias, se dit par les politiciens et s’écrit sur le net. Mais avant de m’engager dans mes critiques des orthodoxies, il me faudra faire une petite introduction sur le thème de l’anti-doctrinalisme. En première partie de ce texte, j’expliquerai ce que j’entends par contre-doctrinaire dans le but d’éviter toute confusion avec d’éventuels blogueurs quant à la définition de ce terme que l’on rencontre peu souvent. En deuxième partie, je développerai, à l’aide d’exemples issus de l’histoire, sur les dangers des doctrines et de l’endoctrinement. Et finalement, en troisième partie, j’exposerai les raisons qui m’ont poussé à créer ce blogue.

Partie 1 : Qu’est-ce qu’un contre-doctrinaire ?

Un petit survol du dictionnaire nous permet de comprendre qu’un doctrinaire est une « personne qui se montre étroitement attachée à une doctrine, c’est-à-dire, un idéologue ou un dogmatique ». Cette personne considère son opinion comme étant fondamentale, incontestable, intangible, inviolable et sacré. Le premier rôle du doctrinaire sera alors de pervertir le sens que l’on doit accorder au mot opinion. Une opinion s’exprime du moment où l’on « admet une possibilité d’erreur », mais comment pourrait-on débattre d’une idée prétendument infalsifiable ? Le deuxième rôle du doctrinaire sera alors de vous faire croire que son opinion peut être exclue de toute analyse ou réflexion critique. Le doctrinaire s’exclura du fardeau de la preuve et n’aura nul besoin d’arguments valables. L’idéologue usera donc d’outils de persuasions qu’il faut apprendre à déceler : des sophismes, des jugements de valeurs, des professions de foi ou un appel incessant aux passions les plus profondes. S’exclure en totalité ou en parti de la raison pour exposer son point de vue subjectif revient donc, si l’on suit le même raisonnement, à énoncer une vérité irrationnelle (?)! La « vérité irrationnelle est un oxymoron (formule logiquement contradictoire). Une vérité irrationnelle est une vérité vide de sens donc de toute possibilité à dire le vrai ». En un mot, cette vérité devient un mensonge.

Un contre-doctrinaire est donc une personne qui refuse, d’abord et avant tout, le mensonge, les demi-vérités et les faux-arguments. Dans une société qui se veut démocratique, il devient primordial de savoir déceler les idéologues qui faussent les débats et qui, sous prétention de détenir la vérité absolue, appliquent leur raisonnement liberticide.

La deuxième partie de ce texte fera la lumière sur les dangers (passés, présents et futurs) des doctrines.