Des doctrines et des hommes-Partie 2

Avant de commencer, je dois le dire et l’écrire, ce que j’écrirai ici dans cette chronique n’est pas nouveau et n’a pas la prétention d’être original. Des milliers d’articles, de thèses et de livres ont été écrit à ce sujet. Comme je l’ai mentionné dans ma chronique précédente, ce texte exposera les dangers des doctrines et des idéologies. Je débuterai avec cette affirmation : Les idéologies ont, dans l’Histoire, provoqué de nombreux méfaits et fait beaucoup de souffrances ; cela tout le monde le conçoit. Malgré ce truisme, le monde actuel n’est pas exempt d’idéologie.

Partie 2- Le danger des doctrines et idéologies

Une doctrine devient délétère dès lors que l’on affirme son caractère irrécusable ; un ensemble de doctrine irrécusable devient une idéologie. Comme Hannah Arendt l’affirme dans son essai sur le totalitarisme, l’idéologie se définie par « la logique d’une idée ». Elle souligne qu’à partir d’une prémisse de base, l’idéologie donne un sens à tout événement quel qu’il soit ; c’est le pouvoir de tout expliquer. Là débute le premier danger de l’idéologie, celui de s’auto-affirmer comme vraie, d’occulter la pensée critique et les arguments contraires et de s’exclure de toute forme d’expérience. En bref, l’idéologie se fait, de par sa logique fallacieuse, le compagnon du mensonge. Le second pas à franchir sera celui de la transmission de cette idéologie.

L’outil de prédilection pour la transmission de l’idéologie est l’endoctrinement. Il s’agit bien entendu de pouvoir gagner quelqu’un à sa cause par « des moyens de persuasion davantage liés aux affects qu’à la raison ». Divers moyens de pressions psychologiques sont utilisé comme celui de susciter l’espoir ou de provoquer la peur. Il s’agit aussi de marteler incessamment les mêmes affirmations et ici, l’ultra simplification est de mise pour que celle-ci soit reprise et répétée facilement par tout le monde. J’expose ici le second danger de l’idéologie qui est celui de la manipulation mentale via l’usage de la propagande. Il ne faut surtout pas sous-estimer l’efficacité de ce moyen de persuasion, il est redoutable. Le dernier pas à franchir sera celui de l’usage de la force.

Le propre d'une idéologie est de chercher à s'imposer, y compris par la violence, en refusant tout apport d'autres modes de pensée qui n'entrerait pas dans son cadre. Ce pas franchi illustre tout le mépris pour l’Homme que l’idéologie peut exprimer ; l’idéologie passant bien sûr avant les Hommes. C'est lorsque la boucle de l’endoctrinement et de la violence s'initie que l’idéologie fait ressortir avec le plus de netteté tous ses méfaits. Voici un extrait d’une pièce de Sartre, Les mains sales, qui illustre assez bien mon propos. Dans ce texte Hoederer traduit la violence idéologique qui donne froid dans le dos, tandis que Hugo représente l’idéaliste qui se bat pour une cause qui lui semble(ait) juste… jusqu’à ce que le dérapage ne survienne.

« Hugo : Il n'y a qu'un seul but: c'est de faire triompher nos idées, toutes nos idées et rien qu'elles.

Hoederer : C'est vrai : tu as des idées, toi. Ça te passera.

Hugo : Vous croyez que je suis le seul à en avoir ? Ce n'était pas pour des idées qu'ils sont morts, les copains qui se sont fait tuer par la police du Régent ? Vous croyez que nous ne les trahirons pas, si nous faisions servir le Parti à dédouaner leurs assassins ?

Hoederer : Je me fous des morts. Ils sont morts pour le Parti et le Parti peut décider ce qu'il veut. Je fais une politique de vivant, pour les vivants.

Hugo : Et vous croyez que les vivants accepteront vos combines ?

Hoederer : On les leur fera avaler tout doucement.

Hugo : En leur mentant ?

Hoederer : En leur mentant quelquefois. (...)

Hugo : Je n'ai jamais menti aux camarades. Je... À quoi ça sert de lutter pour la libération des hommes, si on les méprise assez pour leur bourrer le crâne ?

Hoederer : Je mentirai quand il faudra et je ne méprise personne. Le mensonge ce n'est pas moi qui l'ai inventé: il est né dans une société divisée en classes, et chacun de nous l'a hérité en naissant. Ce n'est pas en refusant de mentir que nous abolirons le mensonge: c'est en usant de tous les moyens pour supprimer les classes.

Hugo : Tous les moyens ne sont pas bons.

Hoederer : Tous les moyens sont bons quand ils sont efficaces».


Toutes les idéologies n’atteignent pas nécessairement ce niveau de dangerosité, mais force est d’admettre que la plupart ont osé le franchir (et le franchiront…). Ici, l’Histoire nous fourni de nombreux exemples d’idéologies ayant dérapées vers la barbarie. Je vous épargne par contre la longue énumération, car vous les connaissez déjà presque tous. Puis il faut aussi savoir que le monde actuel n’est pas exempt d’idéologie prônant la violence, mais cela encore vous le savez. Si le passé est garant de l’avenir, je crois que nous pouvons admettre avec raison que l’Histoire est en train de se répéter et qu’elle se répètera encore malheureusement…